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L’omniprésence technologique et l’évolution rapide du rôle des personnes enseignantes

Soutenir le corps enseignant dans l’utilisation et l’expérimentation des technologies éducatives

«Les personnes enseignantes ont des avis partagés sur l’avenir de l’enseignement supérieur.
Seulement 33 % des personnes interrogées estiment que l’enseignement supérieur va dans la bonne direction.»

La pandémie de COVID-19 a numérisé, du jour au lendemain, les pratiques de travail des personnes enseignantes, transformant rapidement leur rôle. Le corps enseignant considère que cette nouvelle réalité est appelée à se poursuivre, tant les technologies sont désormais omniprésentes et exercent une influence croissante sur l’apprentissage.

Selon un récent rapport commandité par Western Governors University, une université en ligne basée à Salt Lake City (Utah), ce nouveau contexte d’omniprésence technologique crée un clivage au sein du personnel enseignant quant à l’avenir de l’éducation supérieure. Publié en août 2024, le rapport intitulé EdTech and the Evolving Role of Faculty, explore l’expérience de 359 personnes enseignantes et leur relation aux technologies éducatives ainsi que le rôle que celles-ci jouent dans leur pratique professionnelle.

Ce rapport présente un double intérêt. D’une part, il dresse un état des lieux récent de la perception des personnes enseignantes à l’égard des technologies éducatives et de l’avenir de l’enseignement supérieur. D’autre part, il propose diverses recommandations pour améliorer le soutien institutionnel, encourager les possibilités d’expérimenter des technologies éducatives et orienter les choix institutionnels concernant leur utilisation.

L’adoption des technologies éducatives

À la question « Estimez-vous que l’enseignement supérieur suit actuellement la bonne ou la mauvaise direction ? », seulement 33 % des personnes enseignantes estiment que la voie empruntée est la bonne, 47 % restent neutres, et 21 % jugent que nous ne sommes pas sur la bonne trajectoire.

Il est intéressant de noter que l’attitude des personnes enseignantes envers l’avenir de l’éducation supérieure est fortement influencée par la modalité d’enseignement qu’elles privilégient.

« Les modalités d’enseignement influencent les perceptions de l’enseignement supérieur : 42 % des personnes enseignant en ligne [de manière asynchrone] estiment que l’enseignement supérieur suit la bonne direction, contre seulement 20 % de celles qui enseignent en présentiel » (p. 12).

Le rapport suggère que plus une personne est à l’aise dans un environnement technologique, plus elle est en mesure d’en percevoir les avantages. Ces bénéfices restent sans doute moins évidents pour celles qui enseignent dans des formats plus traditionnels, sans médiation technologique.

Qu’elles envisagent un avenir favorable ou non, 92 % des personnes enseignantes interrogées estiment que les technologies éducatives sont là pour rester et qu’elles occuperont probablement un rôle encore plus important à l’avenir. Cela dit, les répondant·es souhaiteraient pouvoir influencer les choix technologiques de leur communauté universitaire. Or, moins de 20 % déclarent avoir eu l’opportunité de le faire pour contribuer à façonner cet avenir.

Quelques pistes stratégiques recommandées par le rapport pour améliorer l’expérience du personnel enseignant :

Créer des comités facultaires sur les technologies éducatives pour donner une voix aux personnes concernées ;
Organiser des groupes de discussion (focus group) pour recueillir les avis et préoccupations du corps enseignant ;
Évaluer l’efficacité des mécanismes actuels permettant au personnel enseignant de s’exprimer, afin de s’assurer qu’ils rejoignent l’ensemble du corps professoral ;
Mener des projets pilotes pour permettre aux personnes enseignantes de tester de nouvelles technologies éducatives.

Qu’en est-il de l’IA en classe ?

Le rapport offre également un aperçu intéressant du niveau d’utilisation de l’IA en classe en novembre 2023, date de leur enquête. Ainsi, 49 % des 359 personnes interrogées déclarent ne pas utiliser l’IA avec leurs apprenant·es, 23 % encouragent leurs groupes à l’employer pour soutenir leurs apprentissages, et seulement 12 % forment explicitement leurs étudiant·es à son utilisation dans le cadre de leur enseignement.

42 % des personnes enseignantes estiment que les outils d’IA auront un impact pédagogique positif, un chiffre qui grimpe à 49 % chez celles qui enseignent dans les disciplines des STIM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques) et qui chute à 35 % dans les domaines des humanités (arts et lettres).

Puisque l’IA « s’impose rapidement dans nos vies […] il est essentiel que les personnes étudiantes reçoivent dans le cadre de leur parcours scolaire des notions de littératie de l’IA » (p.19). Pour aller plus loin en cette matière, soulignons que le Collimateur a consacré plus tôt cette année un cycle de trois épisodes de son balado à la littératie de l’IA.

Quelques pistes stratégiques proposées par le rapport concernant l’IA en classe :

Les établissements devraient élaborer, en collaboration avec le corps enseignant, des politiques encadrant l’utilisation de l’IA en classe ;
Mettre en place des programmes de formation continue pour le personnel enseignant sur l’IA et les technologies éducatives ;
Offrir un soutien institutionnel personnalisé en embauchant des technopédagogues et des conseillers·ères pédagogiques.

Fatigue technologique et épuisement professionnel

La numérisation rapide des pratiques professionnelles des personnes enseignantes depuis la pandémie de COVID-19 entraîne également des effets négatifs. Ainsi, 40 % des personnes sondées déclarent être en situation d’épuisement professionnel.

« Près de 80 % des personnes interrogées affirment se sentir constamment au travail en raison des technologies, et plus de 60 % des enseignant·es trouvent difficile de prendre une pause du travail ou de leurs étudiant·es » (p. 20).

Piste d’action pour les établissements afin de changer la donne :

Aider le corps enseignant à « établir des frontières entre leur vie personnelle et professionnelle » (p. 24), notamment en signalant lorsque les pratiques technologiques deviennent intrusives et peuvent poser problème.