Un cadre national de qualification pour le Québec ?
Avis du Conseil supérieur de l’éducation (Mai 2024)
La Commission de l’éducation des adultes et de la formation continue (CEAFC) du CSE s’est penchée sur la pertinence de la mise en oeuvre d’un cadre national de qualification au Québec. Un tel cadre servirait certainement à mieux organiser et structurer le système actuel d’éducation et de formation des adultes.
Mais plusieurs craignent au contraire qu’un tel cadre ajoute une couche de complexité et limite leur marge de manœuvre. Certains doutent même de la capacité du système actuel à mettre en place une gouvernance réellement représentative de tous les acteurs.
Complexité du système québécois actuel
Le système actuel est très complexe. Il y a de nombreux acteurs impliqués (ministères, écoles, organismes communautaires, entreprises, etc.) qui offrent une multitude de programmes et de formations. Certaines formations sont officiellement reconnues par un diplôme, d’autres non. Bref, c’est difficile de s’y retrouver pour les adultes qui veulent se former.
Objectifs d’un cadre national de qualification
Un cadre de qualification permettrait de classer et de comparer les différentes certifications (diplômes, attestations, etc.) selon une échelle de niveaux. Cela aiderait à mieux comprendre la valeur des formations et faciliterait les passages entre les différents programmes et institutions.
Des équipes de recherche ont identifié des conditions gagnantes pour implanter un cadre de qualification :
- Confier sa gestion à un organisme indépendant du gouvernement
- Adopter une gouvernance multipartite (acteurs de l’éducation, entreprises, syndicats, etc.)
- Avoir une solide infrastructure d’assurance qualité des certifications
- Obtenir l’adhésion de tous les ministères concernés
- Disposer d’un financement adéquat et soutenu
Au niveau international, près de 150 pays ont déjà adopté ou sont en train de développer un tel cadre. Les principaux objectifs sont souvent les mêmes :
- Améliorer la transparence et la compréhension du système
- Faciliter la mobilité des travailleuses et des travailleurs et des adultes apprenants
- Favoriser l’accès et la progression dans les parcours de formation
- Assurer la qualité des certifications
« Le Conseil souhaite susciter une réflexion large et prospective sur la pertinence de doter le Québec d’un cadre national de qualification, un outil structurant déjà mis en place ou en voie de l’être dans près de 150 pays. »
Conseil supérieur de l’éducation, 2024
Le Conseil a ainsi identifié 4 grands objectifs qu’un cadre de qualification pourrait viser au Québec :
- Objectif 1 : Favoriser la fluidité dans les parcours d’apprentissage et la mobilité sur le marché du travail.
- Objectif 2 : Améliorer la transparence et la compréhension du système québécois de formation et de qualification.
- Objectif 3 : Améliorer la gouvernance du système québécois de formation et de qualification et favoriser le développement d’une culture de formation continue.
- Objectif 4 : Fournir un instrument de responsabilité ou d’assurance qualité du système québécois de formation et de qualification.
Au Québec, les acteurs consultés ont souligné l’urgence de mieux structurer le système. Mais plusieurs craignent qu’un cadre ajoute une couche de complexité et limite leur marge de manœuvre. Certains doutent de la capacité du système actuel à mettre en place une gouvernance réellement représentative de tous les acteurs. Il faudrait bien définir les contours d’un tel cadre pour rassurer sur son fonctionnement et ses objectifs.
Les recommandations
« L’issue des consultations ainsi que les études et les recherches qui ont été menées sur le sujet, ici et à l’international, ont conduit le Conseil à proposer sept recommandations qui s’inscrivent sous trois grandes orientations. »
Conseil supérieur de l’éducation, 2024
- Orientation 1 – Doter le Québec d’un outil pour comparer les certifications
3 recommandations liées :- 1. Créer un organisme régulateur indépendant pour développer le cadre;
- 2. Maintenir et élargir les services d’accompagnement aux apprenants adultes;
- 3. Réviser rapidement la Politique gouvernementale pour l’ajuster aux nouvelles réalités.
- Orientation 2 – Mettre en place les conditions d’adhésion, de validité et de pérennité du cadre
3 recommandations liées :- 4. Assurer une gouvernance multipartite et indépendante de l’organisme régulateur;
- 5. Consulter une diversité d’acteurs terrain tout au long du processus;
- 6. Faire une veille prospective sur les cadres de qualification ici et à l’international.
- Orientation 3 – Intensifier la reconnaissance des acquis et des compétences à tous les niveaux
1 recommandation liée :- 7. Soutenir une offre de services de reconnaissance des acquis pour tous les adultes.
Conclusion
Le Conseil croit que les avantages d’un cadre national de qualification l’emportent sur les défis de sa mise en œuvre. Cela permettrait de mieux reconnaître et soutenir le développement des compétences des Québécois.
Mais ce ne serait pas une solution miracle. Il faudrait l’accompagner d’une mise à jour en profondeur de la Politique gouvernementale sur l’éducation des adultes.
La clé du succès sera une gouvernance rassemblant une diversité d’acteurs, tant du milieu de l’éducation que du travail. Cela favorisera non seulement l’adoption du cadre, mais aussi une meilleure concertation entre des acteurs qui travaillent encore trop en silo.
Référence
Conseil supérieur de l’éducation (2024). Un cadre national de qualification pour reconnaître, comparer et soutenir le développement des compétences au Québec, Québec, Le Conseil; La Commission de l’éducation des adultes et de la formation continue (CEAFC), 92 p.
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