Retour sur l’École d’été et le groupe de recherche Arts & Crafts, Aujourd’hui
Partage international entre Écoles supérieures des ARTS
L’École d’été de l’École des arts visuels et médiatiques (EAVM) de l’UQAM visait à proposer de nouvelles méthodes pédagogiques pour former des artistes et designers prêts à entrer sur le marché du travail, engagés pour l’environnement, ouverts à la fois sur le monde et sur les cultures locales.
Dans cet épisode estival spécial en baladodiffusion, nous avons invité deux artistes et pédagogues à l’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM, soit Christine Major et Mario Côté. Liza Petiteau, professeure associée à l’institut de recherche et d’études féministes (IRES), conseillère en pédagogie universitaire et Yves Munn, chargé de projets pédagonumériques au Carrefour d’innovation et de pédagogie universitaire de l’UQAM, se joignent à la conversation.
Ensemble, nous faisons un retour sur une École d’été inédite qui a été vécue à l’UQAM.
(Photos : Karine Gélinas, Carrefour UQAM.)
L’épisode balado
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Retour sur l’école d’été de l’UQAM (01:30)
[Performance sonore de l’École d’été à Grantham au Québec]
Mario Côté souligne la valeur ajoutée de la semaine de travail intensif du groupe Arts & Crafts, composé de professeurs et d’étudiants passionnés de diverses écoles étrangères, dont des institutions européennes. L’événement final de cette semaine intensive a été particulièrement rassembleur et émouvant, témoignant de l’investissement de tous les participants dans ce projet collaboratif. Christine Major explique que malgré les défis posés en 2022 par la pandémie, la distance et les barrières linguistiques, des professeurs et étudiants de diverses Écoles supérieures d’art ont su développer une synergie passionnée grâce à leur grande capacité d’écoute et d’adaptation.
L’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM au coeur d’une collaboration internationale (04:02)
Depuis 2014, l’UQAM collabore avec l’École supérieure d’art et de design de Saint-Étienne, l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles, et plus récemment avec des institutions en Tunisie, au Portugal et au Maroc. Mario Côté raconte l’évolution de ce partenariat stratégique Erasmus+ depuis 2020. Ces échanges ont permis de créer un réseau dynamique de partenaires partageant une vision commune de la recherche et de l’enseignement des arts visuels. Le projet de création d’un abécédaire commun a servi de fil conducteur lors des différentes étapes de collaboration. Les discussions portaient aussi sur la mise en place d’une base de données commune, témoignant d’un désir de partage et d’échange entre les participants.
Les thèmes centraux : matérialité et donner corps à la recherche (08:27)
Deux grands thèmes ont émergé de ces échanges : La matérialité des engagements et Donner corps à la recherche. Ces thèmes sont au cœur des débats entre les écoles, opposant souvent la tradition artisanale à une société de plus en plus numérique. L’idée d’un manifeste pour la matérialité a été proposée, soulignant l’importance de l’intelligence des matériaux dans la pratique artistique.
L’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM en partenariat avec l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ARBA), avaient pour mandat de construire des bifurcations pédagogiques. L’objectif était de faire bifurquer la pédagogie en intégrant la matérialité des engagements. La semaine Arts & Crafts a été l’occasion de réfléchir à cette approche.
Les bifurcations pédagogiques représentent des moments où les pratiques éducatives traditionnelles sont remises en question, où de nouvelles idées émergent et où de nouvelles voies sont explorées pour améliorer l’apprentissage et l’enseignement. Ces moments de dérivation impliquent souvent de repenser les méthodes d’enseignement, les approches pédagogiques et les structures éducatives existantes.
Pratique artistique et enseignement des arts (11:44)
Mario Côté souligne deux grands thèmes qui suscitent des débats entre les écoles : la pratique artistique et l’enseignement des arts. Dans la pratique artistique, il observe un engagement envers les savoir-faire artisanaux et traditionnels, qui s’oppose à la société hyperconnectée et à l’emprise du numérique. Bien que le numérique soit présent dans les pratiques et la vie, il est important de le questionner et de se démarquer de cette question.
En ce qui concerne l’enseignement, il existe une différence entre l’approche européenne, marquée par un héritage lourd de la tradition et une hiérarchie maître-élève, et ce qui se fait en Amérique. Les jeunes professeurs européens montrent un intérêt pour les pratiques d’enseignement américaines.
Ces questions animent l’École des arts visuels depuis longtemps, qui a dû s’intégrer à l’UQAM pour survivre. Ces enjeux sont au cœur des préoccupations du groupe de recherche.
Des ateliers transformés en « zones d’apprentissage » (15:25)
Pour cette École d’été, les traditionnels ateliers « Workshops » ont été repensés en « zones d’apprentissage ». Cette approche visait à sortir du cadre académique traditionnel et à favoriser une interaction plus organique et relationnelle entre les participants. Par exemple, un atelier consistait à lire un texte philosophique de Hannah Arendt en déambulant dans la ville, créant ainsi une expérience immersive et contextuelle.
L’art de l’enquête et l’attention au monde (17:24)
Christine Major partage une définition sur la notion de matérialité développée en collaboration avec l’École de Bruxelles. Selon cette définition, « la pédagogie d’un cours qui voudrait mettre de l’avant cette notion de matérialité consiste moins en la transmission d’informations, qu’en l’apprentissage d’un mode d’attention au monde. Initier l’apprenant à cet art de l’enquête implique donc de donner une place centrale à l’expérimentation, puisqu’il s’agit bien d’étudier auprès du monde, d’en épouser les aspérités, plus que d’en décrire en se tenant à distance. »
Christine Major souligne l’importance de développer une habileté à créer des conditions d’enquête, en prenant l’exemple de l’exploration d’un terrain en friche. L’objectif est d’identifier le potentiel de ce terrain sans l’exploiter, mais en en extrayant un potentiel d’art ou de réflexion. Cela nécessite de mettre en place des conditions spécifiques pour favoriser cette démarche.
Un défi pédagogique pour la personne enseignante (21:45)
L’un des défis majeurs de cette École d’été a été de concilier les exigences académiques avec une approche plus expérimentale et ouverte. Les enseignants ont dû s’adapter à de nouvelles méthodes, comme l’exploration de terrains en friche ou la déambulation en forêt, pour encourager une attention au vivant et à l’environnement.
Donner corps au texte (23:14)
Mario Côté partage son expérience déstabilisante, mais enrichissante de passer d’un enseignement magistral à une approche plus organique. Lors d’un atelier, il a fait lire à haute voix un texte philosophique de Hannah Arendt tout en se promenant dans les rues de Montréal. Cette méthode a permis aux participants de s’immerger dans le texte de manière vivante, en confrontant la théorie aux réalités urbaines. Christine Major ajoute que cette approche a permis une appropriation personnelle du texte par chaque participant, rendant l’expérience touchante et incarnée. L’atelier a également inclus des activités de déconstruction et de collage du texte, ajoutant une dimension matérielle et sensible à l’apprentissage.
Une expérience collective et émouvante (27:25)
L’événement de clôture de l’École d’été a été particulièrement émouvant, réunissant professeurs et étudiants de différentes écoles. Les participants ont travaillé ensemble sur des projets communs, comme la sérigraphie, où même ceux qui n’avaient jamais pratiqué cette technique ont pu s’exprimer et créer des motifs répétés, transformant le local en un espace de création collective. Cette école d’été a non seulement renforcé les liens entre les institutions participantes, mais elle a aussi ouvert de nouvelles perspectives pédagogiques.
Une collaboration qui continue (30:01)
L’UQAM, en tant que moteur de ce projet, continue de jouer un rôle central dans cette aventure pédagogique et artistique. L’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM et le projet ARTS & CRAFTS illustrent parfaitement comment la collaboration internationale et l’innovation pédagogique peuvent enrichir l’enseignement des arts.
Depuis l’enregistrement de cet épisode balado, la semaine Workshops « Procédure et Matériaux » | Programme Arts and Crafts aujourd’hui de l’École supérieure d’art et design de Saint-Étienne s’est déroulée à Bruxelles du 4 au 7 avril 2024 (voir vidéo ci-dessous). La semaine s’est conclue par une exposition à la Cité du design de travaux produits au cours du programme.
À propos du projet Arts & Crafts, aujourd’hui
Le projet de recherche Arts & Crafts, aujourd’hui se fixe pour objectif de devenir une plateforme d’échanges et de partage entre différentes écoles d’art. Il a été initié en 2018 et développé en partenariat avec des Écoles supérieures des Arts partenaires à l’international depuis.
Il s’agit de :
- l’Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles ArBA, Belgique
- l’Academy of Fine Arts and Design in Bratislava VSVU, Slovaquie
- l’École supérieure d’art et design de Saint-Étienne, France
- la Faculté des Beaux-Arts de l’Université de Porto FBAU, Portugal
- l’Institut National des Beaux-Arts de Tétouan, Maroc
- l’École des arts visuels et médiatiques de l’Université de Québec à Montréal, Canada
Programme d’échange internationaux
Les objectifs de ce programme d’échanges internationaux sont triples : explorer la posture particulière de l’artiste en tant qu’acteur de changement sociétal, favoriser l’innovation ainsi qu’une transformation des regards et des usages à travers la collaboration entre métiers d’art, designer et artistes.
Parmi les réalisations du programme de recherche figurent de nombreux « Workshops » (Zones d’apprentissages) expérimentaux organisés successivement par chacune des écoles partenaires, la création d’un abécédaire (À venir) et la mise en ligne d’une plateforme collaborative destinée à recevoir des contributions de l’ensemble des personnes intéressées par le sujet.