Imaginer les futurs possibles : 600 idées audacieuses
Pour façonner la suite du monde
Pour répondre à la crise climatique et aux nombreux enjeux sociaux actuels, il est nécessaire de mobiliser les ressources d’un « imaginaire radical ». Celui-ci nous permettrait de redécouvrir le champ des possibles. C’est ce que plaide Rob Hopkins, professeur de permaculture et militant écologiste britannique, dans un manifeste publié le 15 avril 2024.
La publication en anglais du Ministère de l’imagination (« Ministry of Imagination » — accéder au PDF du manifeste) vise à influencer les politiques publiques des gouvernements du monde entier, tout en stimulant les conversations sur les futurs désirables que nous souhaitons voir advenir.
Organisé en 35 grands champs d’intervention, allant des transports à l’urbanisme, en passant par les technologies de l’information, l’économie, le monde du travail, l’alimentation et, bien sûr, l’éducation, ce manifeste propose un vaste florilège de plus de 600 idées. Ces propositions visent à établir un rapport plus harmonieux entre l’être humain et le monde naturel auquel il appartient.
On l’aura compris, le fil rouge de ce nouvel imaginaire consiste à faire advenir la transition socioécologique dans toutes les sphères de l’activité humaine.
La démarche de Hopkins
un mouvement qui vise à stimuler des changements profonds face à la crise climatique. Ce mouvement s’ancre dans le contexte des villes et des communautés locales, ou plus généralement de chaque « biorégion ». Une biorégion est définie comme « un territoire dont les limites ne sont pas déterminées par des frontières politiques, mais par des limites géographiques prenant en compte tant les communautés humaines que les écosystèmes .» (source : Wikipédia).
La démarche de création de son manifeste mérite également d’être soulignée. Les propositions qui fondent ce document proviennent des discussions avec des personnes de tous horizons que Hopkins a reçues dans sa série de balados, intitulée From What If to What’s Next. Le centième et dernier épisode de cette série a été diffusé en mars dernier.
Afin de clôturer en beauté son émission, Hopkins a décidé d’échantillonner les propositions de ses invités pour créer un manifeste. Ce dernier assemble une pluralité de voix qui, chacune à sa manière, tente de façonner un monde meilleur. Le résultat est une mosaïque d’idées tellement vaste que tenter d’en proposer un résumé est un exercice périlleux.
Imaginer le milieu universitaire de demain
Contournons cette difficulté en relevant quelques idées-phrases relatives à l’éducation et au milieu universitaire. Prenons, par exemple, la proposition du biologiste Christian Daniel Wahl, qui met au défi les institutions du savoir de se transformer en centres de transfert de connaissances et en centres d’apprentissage biorégionaux :
« Les universités ont le potentiel de sensibiliser le public aux réalités des biorégions où elles se trouvent. Elles devraient s’assurer que chaque discipline utilise son approche spécifique pour étudier en détail sa biorégion. Ce travail devrait être accompli dans tous les départements universitaires. Ce n’est qu’alors que les universités rempliront véritablement leur rôle envers le public, en devenant des centres d’apprentissage biorégionaux. Cela permettra de former des citoyens éclairés, capables de prendre des décisions bien informées sur la gestion collective des biens communs et de l’écosystème auquel nous appartenons tous. »
Christian Daniel Wahl
Quel curriculum pour former les générations futures ?
En ce qui concerne les changements à apporter en éducation, les propositions abondent. Concentrons-nous ici sur quelques suggestions relatives au curriculum :
« Il faudrait institutionnaliser l’enseignement de la transition dans les écoles, en intégrant également l’apprentissage pratique. Les élèves devraient apprendre à jardiner, cuisiner, s’occuper des animaux, réutiliser et recycler. Sans ces changements significatifs dans le système éducatif, il est difficile d’imaginer une transformation profonde de la société. »
Christian Jonet, co-fondateur de Liège en transition
« De l’âge de 3 à 18 ans, l’observation des oiseaux et l’apprentissage sur la faune devraient être obligatoires pour au moins une à deux heures par semaine. Premièrement, cela augmenterait la conscience collective du monde qui nous entoure et de notre interaction avec lui. Deuxièmement, cela rendrait les individus plus sensibles au monde naturel et à son évolution au fil du temps, ainsi qu’à notre impact sur celui-ci. »
Reuben Fakoya-Brooks, zoologue
« Il serait judicieux d’introduire une matière obligatoire axée sur l’industrie agricole, le secteur de l’environnement et la soutenabilité mondiale. Ainsi, une fois prêts à entrer sur le marché du travail, les individus intègreront naturellement ces connaissances à leur culture professionnelle, quelle que soit leur future carrière. Ils garderont ces éléments en tête, quel que soit le travail qu’ils effectueront. »
Bushra Schuitemaker, zoologue
« Permettre à nos enfants de grandir avec une capacité d’attention aussi intacte que possible constitue l’une des motivations principales pour introduire des cours d’écoute profonde (deep listening) à l’école. Ces cours seraient intégrés dans le programme d’études, parallèlement à l’écoute critique. Si nos élèves sont capables d’écouter profondément et de penser de manière critique, ils seront en mesure de développer des idées critiques. »
Rob Hopkin
Pour aller plus loin
Bibliographie
Hopkins, R. (2020, 15 juin). From What if to What Next. https://www.robhopkins.net/podcast/
Hopkins, R. Ministry of Imagination. https://www.robhopkins.net/2024/04/15/ministry-of-imagination-manifesto-released-as-the-world-goes-to-the-polls/ avril 2024.